Charente-Maritime

La place des Femmes

1. Inégalités salariales : des statistiques implacables

En Gironde, l’écart monte à 460 € à l’avantage des hommes. En Charente-Maritime, c’est 345 €, Comme en Charente. Mais en Dordogne, il se réduit à 265 € et même 180 € en Creuse. En 2015, l’écart était de 13 % au détriment des femmes chez les ouvriers, de 5,4 % chez les employés (où les femmes sont surreprésentées), de 12,9 % chez les professions intermédiaires. Il monte à 20,7 % pour les cadres.

À noter que 85% des emplois partiels sont occupés par des femmes! Pour 42 % d’entre elles, ce n’est pas un choix personnel. Si elles brillent davantage dans leurs études, les femmes ne sont pas forcément payées en retour. Par ailleurs, l’écart salarial se creuse de 5,3 % à 22,1 % au fil des carrières, non sans effet sur le niveau de vie des femmes et leurs retraites. Les grossesses sans revalorisation salariale au retour l’expliquent en partie.

2. Le monde politique est-il sexiste ?
En avril, c’est la politique locale que nous scrutons. Outre un entretien avec Ségolène Royal, un zoom sur l’assemblée désormais paritaire du Conseil départemental, nous proposons une rencontre avec trois élues de l’agglomération rochelaise. Sylvie Guerry-Gazeau (maire de Clavette), Marie-Gabrielle Nassivet (maire de Thairé-d’Aunis) et Nicole Thoreau (2e adjointe de Périgny) sont membres d’un réseau national de femmes politiques, « Élues locales ».

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Le trio déplore que sur les 28 communes de l’Agglomération rochelaise, il n’y ait que trois femmes à avoir brisé le plafond de verre et à être devenue maire. « À peine 11 % des maires sont des femmes, ce n’est pas beaucoup », soupire Nicole Thoreau. Quant à Marie-Gabrielle Nassivet, elle assure qu’ »au niveau de l’agglomération, on peut ressentir des petits sourires complaisants. Nous sommes moins prises au sérieux lors de nos prises de parole quand on est une femme. »

Les délégations municipales octroyées aux élues disent aussi beaucoup de la répartition genrée véhiculée par le monde politique. « J’ai calculé que 91 % des délégations sociales sont confiées à des femmes sur les 28 communes de l’Agglo. Il n’y a que deux communes où l’adjoint aux affaires sociales est un homme, à Saint-Xandre et à Dompierre-sur-Mer », insiste Nicole Thoreau, elle-même adjointe aux affaires sociales et à l’éducation à Périgny. » Et pour l’urbanisme, c’est la problématique inverse », glisse Sylvie Guerry-Gazeau avec seulement deux adjointes à l’urbanisme (Martine Villenave à Aytré et Sally Chadjaa à Dompierre-sur-Mer).

3. Musique : les femmes ne sont pas sur le devant de la scène
Au mois de mai, alors que les premiers festivals fleurissent, « Sud Ouest » interroge la place accordée aux femmes par les grandes scènes du département. Au Stereoparc de Rochefort, il n’y a pas l’ombre d’une DJ sur les douze artistes programmés par l’édition 2019. Elles ne sont que trois ou quatre têtes d’affiche féminines sur 22 groupes annoncés au Free Music de Montendre.

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Les Francofolies font figure de bon élève même si on est encore loin de la médaille puisque six chanteuses sont programmées sur la Grande Scène parmi la vingtaine de noms à l’affiche de l’été 2019 et deux sur six au Grand-Théâtre… À La Sirène, scène de musiques actuelles de La Rochelle, les filles ne représentent même pas 15 % sur près de 70 concerts calés pour l’année 2019, un chiffre désolant mais très proche de la moyenne nationale.

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Pourquoi alors si peu de femmes sur le devant de la scène, et pourquoi ça bloque ? La question gêne aux entournures. Et si on passait aux quotas, vingt ans après la loi sur la parité en politique ? À son arrivée en 2017, le directeur de La Coursive, Franck Becker, a imposé la parité entre les huit artistes associés à la scène nationale. Mais côté saison, il reconnaît le gros déficit de pièces portées par des femmes :

« Le problème ne date pas d’hier. C’est un effet mathématique. Depuis la nuit des temps, il y a plus de créateurs masculins. Dans tous les établissements de formation, il y a plus de femmes. Le problème, c’est qu’au bout de cinq ou dix ans, ce sont les hommes qui finissent par occuper les postes de pouvoir. D’où la nécessité de passer par la discrimination positive.  »
4. Et dans le sport, les femmes entraînent très peu…
Si Charline Picon, championne olympique de planche à voile, assure ne pas avoir été confrontée à une quelconque discrimination sexiste – »au contraire, j’ai été un peu protégée »–, la sous-représentation des femmes sur les bancs de touche des clubs féminins de foot interpelle. Mais ça ne trouble pas plus que ça le milieu du ballon rond départemental.

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« Cette saison, quand j’ai annoncé que je laissais ma place d’entraîneur de Bussac-Forêt, nous étions prêts à étudier la candidature d’une femme, mais il n’y en a pas eu. Nous n’avons pas de tabou, cela ne nous aurait pas posés de problème », assure Jean-Philipe Ducoux, que Kevin Mette remplacera donc sur le banc de touche des « Gazelles » de Haute-Saintonge. À Saint-Porchaire / Corme-Royal, David Denis est le technicien en place. Chez les promues d’Aigrefeuille-d’Aunis, c’est Yann Bacquart. À l’échelon départemental, c’est simple, seules les filles du FC Portes-d’Océan sont coachées par une femme.

5. Combattre et prévenir les violences faites aux femmes
En septembre, nous nous appuyons sur le dispositif anti-violences conjugales lancé et expérimenté par le parquet de Saintes pour aiguiller nos lecteurs sur les moyens de lutter contre ce fléau. On y apprend notamment que ce dispositif induit de renforcer le suivi d’un auteur de violences conjugales dans la phase qui précède son procès en effectuant un travail sur l’addiction : « Comme pour la drogue ou l’alcool, la violence est une addiction », pointait d’ailleurs Anthony Pelleman, directeur général de l’association enquête et médiation (ÆM).

>> Suivi anti-violences conjugales : « Attention à ce que ce ne soit pas un dispositif cosmétique »

Avocate au barreau de La Rochelle, Clémence Allain insiste quant à elle sur la nécessité absolue de « porter plainte ». Et l’avocate d’ajouter : « Ce qui m’interroge, sans jugement de ma part, c’est lorsque ces femmes qui sont l’objet de violence ne réagissent pas. Qu’elles n’ont pas l’instinct de se protéger. »

6. Économie : pour ou contre les lobbies féministes ?
En octobre, nous nous intéressons aux clubs d’entreprise. En Charente-Maritime, ils sont de plus en plus nombreux et la plupart d’entre eux sont exclusivement réservés aux femmes. C’est notamment le cas d’Entreprendre au féminin. Johanna Marié, sa co-présidente, nous expliquait une ligne directrice fortement assumée :

« Chez nous, les hommes sont interdits et ils le vivent mal. Ils nous traitent de club féministe. Nous avons choisi de rester entre femmes et c’est d’ailleurs dans nos statuts. »
Une des raisons de cet entre-soi revendiqué : « Les problématiques particulières des cheffes d’entreprise. » Ces arguments, la Rochelaise Isabelle Baudet n’y adhère pas. Elle-même animatrice d’un club d’entreprise, elle nous explique avec conviction « qu’agir en silo ou en ghetto peut provoquer l’effet contraire à celui recherché. »

>> La Rochelle : « L’homme, chef d’entreprise, paraît plus légitime au premier abord »

7. La drague à l’épreuve de #MeToo
Au mois de novembre, place au jeu de la séduction et à la drague. Pour essayer d’y voir plus clair dans ces rapports qui se distendent ou se compliquent parfois entre femmes et hommes, les journalistes de « Sud Ouest » battent notamment le pavé des soirées rochelaises. Auprès des plus jeunes, certains témoignages édifiants : « En dix ans, cela a clairement changé estimait Manon. Avant, leur approche était plus élégante, en douceur. Aujourd’hui, les hommes en soirée se sentent en position de force. »

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